Le bouddhisme theravada est la religion d’État pratiquée par environ 95 % de la population du Cambodge. Il influence profondément la vie quotidienne, les traditions et les valeurs du pays.
Le bouddhisme khmer est un système de croyances qui combine les enseignements bouddhistes avec l’animisme et le brahmanisme, incluant la croyance en des esprits et des divinités indigènes. Le rôle des moines et des Achars (laïcs) est central dans la vie religieuse, avec les fidèles qui acquièrent des mérites par des dons et des offrandes.
Racines historiques et évolution
L’histoire du bouddhisme au Cambodge est un long et complexe voyage, mêlé à l’essor et au déclin de grands empires. On pense que le bouddhisme est arrivé dans la région dès le IIIe siècle avant J.-C., grâce à des missionnaires venus d’Inde. C’est toutefois sous le royaume du Funan (du Ier au VIe siècle de notre ère) et, plus tard, sous le royaume de Chenla (du VIe au IXe siècle) que le bouddhisme a commencé à s’implanter, coexistant avec un hindouisme dominant. Des inscriptions sanskrites et une multitude de statues de cette période témoignent d’une riche culture syncrétique où les deux religions ont prospéré.
L’Empire khmer (du IXe au XVe siècle) a vu la coexistence continue de l’hindouisme et du bouddhisme mahayana. Le règne du roi Jayavarman VII (1181-1218) a marqué un tournant. Fervent bouddhiste mahayana, il en fit sa religion d’État et construisit des temples monumentaux comme le Bayon, célèbre pour ses imposants visages de pierre. Cependant, après le déclin de la période angkorienne, le bouddhisme theravada devint progressivement la religion dominante, supplantant les autres formes de religion.
(Note : Le culte Theravada est plus près des enseignements du Bouddha et des activités monastiques, alors que Mahayana a une vue plus large des idéaux de ces enseignements et des relations humaines.)
Le XXe siècle a été marqué par des défis considérables. Le régime des Khmers rouges (1975-1979) a été une période de persécutions effroyables. Voulant éradiquer toute forme de vie et de religion traditionnelles cambodgiennes, le régime a exécuté des moines, détruit des pagodes et contraint d’autres à abjurer leur foi. Pourtant, le bouddhisme a survécu dans le cœur de la population. Après la chute du régime, un puissant renouveau a commencé, avec la reconstruction de pagodes et le rétablissement de la vie monastique, consolidant la place du bouddhisme comme pierre angulaire de l’identité nationale.
Le rôle des wats et des moines dans la société
Au cœur du bouddhisme cambodgien se trouvent les wats (pagodes ou monastères), qui sont bien plus que de simples lieux de culte. Ce sont aussi les centres sociaux, culturels et éducatifs des communautés, un espace pour les rassemblements, les festivals et les services sociaux. La communauté de moines bouddhistes, joue un rôle central dans la société cambodgienne. Les moines sont hautement vénérés et servent de guides spirituels, d’enseignants et de modèles moraux. Historiquement, les wats étaient la principale source d’éducation des garçons, leur fournissant l’alphabétisation et un cadre moral. Aujourd’hui encore, de nombreux jeunes hommes, notamment issus de familles rurales ou pauvres, entrent dans la vie monastique pour une période temporaire afin d’acquérir des mérites pour leur famille et de recevoir une éducation. Cette ordination temporaire est un rite de passage hautement respecté.
Les moines sont de même sollicités pour présider les événements importants de la vie, des mariages et des funérailles aux bénédictions de maisons et aux inaugurations de nouvelles entreprises. Leur présence est censée apporter chance et paix. Dans les zones rurales, les gens se tournent souvent vers les moines pour obtenir des conseils, des soins et même des prédictions, reflétant ainsi le mélange des principes bouddhistes et des croyances animistes traditionnelles.
L’influence du bouddhisme sur la vie quotidienne et la culture
L’influence du bouddhisme imprègne la culture et la vie quotidienne cambodgiennes de multiples façons. Les principes fondamentaux du bouddhisme Theravada, tels que le karma, la création de mérites et le cycle de la réincarnation, constituent le fondement des valeurs et des normes sociales cambodgiennes. Le concept de karma, selon lequel les actions d’une personne dans cette vie déterminent son avenir, encourage les individus à accomplir de bonnes actions, comme faire l’aumône aux moines et aider les personnes dans le besoin, afin d’accumuler du mérite. Cette importance accordée à la non-confrontation, à la patience et à la douceur est également perçue comme un reflet des idéaux bouddhistes.
L’art et l’architecture cambodgiens témoignent de cette influence. Les magnifiques temples d’Angkor, avec leurs sculptures complexes de divinités bouddhistes et hindoues, sont un parfait exemple de cet héritage syncrétique. Les statues emblématiques du Bouddha, présentes dans tout le pays, sont autant des figures religieuses que des chefs-d’œuvre artistiques reflétant des siècles d’évolution culturelle.
Les festivals sont un autre domaine où l’influence du bouddhisme se manifeste pleinement. Pchum Ben, ou Fête des Ancêtres, est une fête de 15 jours au cours de laquelle les Cambodgiens se rendent dans les pagodes pour faire des offrandes de nourriture aux moines au nom de leurs proches décédés, croyant que le mérite de ces actes aidera leurs ancêtres à trouver la paix. Visak Bochea, qui commémore la naissance, l’illumination et la mort du Bouddha, est une autre fête majeure célébrée par des processions, des prières et des offrandes dans les wats du pays.